Dans un précédent
article (
lire
) nous commentions un Arrêt du Conseil d'État
relatif au versement de l'indemnité de
sujétions spéciales polices (ISSP) aux
policiers en position de congés de longue maladie ou
de longue durée. Dans cette affaire, le ministre
de l'Intérieur avait déposé un recours
visant à voir annuler un jugement du tribunal
administratif de Marseille et une décision de la cour
administrative d'appel de Marseille. Ces deux juridictions
avaient fait droit à une demande formulée par
un gardien de la paix et visant au versement de l'ISSP dont
il avait été privé alors qu'il
était en position de longue maladie puis de longue
durée. Le Conseil d'État, ainsi
que nous l'avions indiqué, a donné raison au
ministre considérant que :
" le traitement est
lié à un indice propre à chaque agent
public et à un montant régulièrement
actualisé et n'inclut aucune indemnité,
qu'elle fasse ou non l'objet d'une retenu pour pension,
sauf disposition expresse de nature législative ou
réglementaire prévoyant une telle
intégration
l'indemnité
(ISSP) attachée à l'exercice des
fonction, n'est pas au nombre de celles dont le maintien est
prévu par l'article 37 du décret du 14 mars
1986 ; M. LAUREAU (le demandeur) ne peut, en tout
état de cause, se prévaloir de diverses
circulaires ministérielles dépourvues de
caractère réglementaire . " En effet, le 30 décembre
1998, la FPIP obtenait l'annulation de deux instructions
ministérielles relatives au versement de l'ISSP. Dans
ses considérations, le Conseil d'État
rappelait sa décision du 19 juin 1992 (Arrêt
DOUCET) par laquelle : " L'indemnité de
sujétions spéciales des personnels actifs de
la police , dès lors où elle est soumise
à retenue pour pension, présente le
caractère d'un supplément de traitement.
" La difficulté semble
aujourd'hui résider dans la rédaction de
l'article 37 du décret 86-442 du 14 mars 1986 relatif
au paiement du traitement pour les agents en position de
longue maladie ou de longue durée : " Au traitement s'ajoute les
avantages familiaux et la totalité des
indemnités accessoires, à l'exclusion de
celles qui sont attachées à l'exercice de la
fonction
" Dans une décision rendue
le 10 juin 2003*, la Cour Administrative d'Appel de
Marseille vient de rejeter une demande déposée
dans le même cadre. Une note du préfet
délégué pour la sécurité
et la défense de la zone de défense sud-ouest,
en date du 11 juillet 2003, vient interrompre à
compter du 1er juillet
2003 le versement de
l'ISSP aux agents en position de congés longue
durée ou longue maladie. * Cour administrative d'appel de Marseille,
10 juin 2003, n° 00MA02031, M. Jean C.
Le traitement visé par les
dispositions de l'article 20 de la loi du 13
juillet 1983 est lié à un indice
propre à chaque agent public et à un
montant régulièrement
actualisé et n'inclut aucune
indemnité, qu'elle fasse ou non l'objet
d'une retenue pour pension, sauf disposition
expresse de nature législative ou
réglementaire prévoyant une telle
intégration. Il s'en suit que la seule
circonstance que l'indemnité spéciale
aux personnels des services actifs de la police
soit soumise à retenue pour pension ne peut
être utilement invoquée pour soutenir
qu'elle doit être regardée comme
partie intégrante du traitement de
l'agent. Vu la requête, enregistrée au
greffe de la Cour administrative d'appel de
Marseille le 11 septembre 2000 sous le n°
00MA02031, présentée pour M. Jean C.
; M. C. demande à la Cour : 1°/ d'annuler le jugement en date du 27
avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de
Marseille a rejeté sa demande tendant
à l'annulation de la décision
implicite de rejet née du silence
gardé par le ministre de l'intérieur
sur le recours hiérarchique formulé
le 2 septembre 1996 contre la décision
implicite de rejet de sa demande de paiement de
l'indemnité spéciale aux personnels
des services actifs de la police, pour la
période de juin 1992 à janvier 1993
durant laquelle il était placé en
congé de longue durée, par le
préfet du département des Bouches du
Rhône ; 2°/ d'annuler la décision implicite
de rejet née du silence gardé par le
ministre de l'intérieur sur le recours
hiérarchique formulé le 2 septembre
1996 contre la décision implicite de rejet
de sa demande de paiement de l'indemnité
spéciale aux personnels des services actifs
de la police, pour la période de juin 1992
à janvier 1993 durant laquelle il a
été placé en congé de
longue durée, par le préfet du
département des Bouches du Rhône ;
3°/ de condamner l'État à lui
verser la somme de 16 193,06 F représentant
le rappel de l'indemnité spéciale aux
personnels des services actifs de la police
impayée pour la période de juin 1992
à janvier 1993 avec les
intérêts légaux à
compter de l'enregistrement de la requête ;
4°/ de faire application des dispositions
de l'article L.8-2 du code des tribunaux
administratifs et des cours administratives d'appel
; 5°/ de condamner l'État à lui
verser la somme de 10 000 F au titre de l'article
L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des
cours administratives d'appel ; Il soutient que selon l'arrêt Doucet du
Conseil d'État du 19 juin 1992,
l'indemnité sollicitée est un
supplément de traitement dès lors
qu'elle est soumise à retenue pour pension ;
que dès lors elle est due en dehors de
l'exercice des fonctions notamment durant les
congés de maladie ordinaire, de longue
maladie ou de longue durée ; que d'ailleurs
une circulaire ministérielle du 27
décembre 1994 et une circulaire
ministérielle du 9 février 1995
indiquent expressément qu'elle doit
être maintenue dans le cas des congés
de longue maladie ou de longue durée ; que
le ministre en refusant de la verser à
l'exposant pour la période demandée a
fait une inexacte application du droit et a
méconnu le principe d'égalité
de traitement des fonctionnaires appartenant
à un même corps ; Vu le mémoire enregistré le 25
avril 2001 présenté par le ministre
de l'intérieur ; Le ministre demande à la Cour : 1°/ de rejeter la requête ; 2°/ de condamner M. C. à verser
à l'État la somme de 5 000 F au titre
de l'article L.761-1 du code de justice
administrative ; Il soutient que le requérant invoque la
mauvaise interprétation faite par les juges
de première instance de l'arrêt Doucet
; qu'en effet à la suite d'une demande
formulée conjointement par le ministre de
l'intérieur et par le ministre de la
fonction publique, un avis a été
rendu par la section des finances du Conseil
d'État le 13 janvier 1998 sur la nature des
indemnités soumises à retenue pour
pension ; que selon cet avis, alors même
qu'elles sont soumises à retenue pour
pension, ces indemnités ne sont pas incluses
dans le traitement, sauf pour les opérations
comptables permettant de calculer les retenues et
droits à pension des fonctionnaires en
bénéficiant ; que le traitement ne
comprend pas les indemnités soumises
à retenue pour pension ; que cet avis a donc
apporté une limite aux conséquences
qu'il convenait de tirer de l'arrêt Doucet,
en refusant de considérer que
l'indemnité de sujétions
spéciales de police soit une partie
intégrante du traitement ; que cela est
d'autant plus évident que cette
indemnité a été
substituée par le décret n°
58-517 du 29 mai 1958 à la prime de risque,
à l'indemnité de déplacement
à l'intérieur de la résidence,
à la prime de danger des CRS et à
l'indemnité exceptionnelle des personnels de
la police, indemnités qui aux termes de
l'article 4 de la loi n° 48-1504 du 28
septembre 1948 sont allouées aux personnels
de police en raison de la nature
particulière de leurs fonctions et des
missions qui leur sont confiées ; que son
versement est donc lié à l'exercice
effectif des fonctions ; que dès lors les
demandes du requérant ne sont pas
fondées ; que de plus
l'intéressé a déjà
perçu, par la voie de sa mutuelle, le
montant de l'indemnité sollicitée ;
qu'il n'est donc pas fondé à la
réclamer à l'administration ; Vu le jugement attaqué ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la loi n° 48-1504 du 28 septembre 1948 ;
Vu la loi n° 82-1126 du 29 décembre
1982 portant loi de finances pour 1983, et
notamment son article 95 ; Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
modifiée portant droits et obligations des
fonctionnaires, notamment son article 20 ; Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984
portant dispositions statutaires relatives à
la fonction publique de l'État ; Vu le décret n° 58-517 du 29 mai
1958 portant attribution d'une indemnité
spéciale aux personnels de police ; Vu le décret n° 86-442 du 14 mars
1986 relatif à la désignation des
médecins agréés, à
l'organisation des comités médicaux
et des commissions de réformes, aux
conditions d'aptitude physique pour l'admission aux
emplois publics et au régime de
congés de maladie des fonctionnaires ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été
régulièrement averties du jour de
l'audience ; Après avoir entendu au cours de
l'audience publique du 27 mai 2003 : le rapport de Mme FERNANDEZ, premier
conseiller ; et les conclusions de M. BOCQUET, premier
conseiller ; Au fond : Considérant qu'il ressort des
pièces du dossier que M. C., fonctionnaire
de police nationale, ayant été
placé en congé de longue
durée, a fait une demande de paiement de
l'indemnité spéciale aux personnels
des services actifs de la police au ministre de
l'intérieur pour cette période,
laquelle a été rejetée
implicitement par la décision
attaquée ; Considérant qu'aux termes de l'article 20
de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : "Les
fonctionnaires ont droit, après service
fait, à une rémunération
comprenant le traitement, l'indemnité de
résidence, le supplément familial de
traitement ainsi que les indemnités
instituées par un texte législatif ou
réglementaire. S'y ajoutent les prestations
familiales obligatoires. Le montant du traitement
est fixé en fonction du grade de l'agent et
de l'échelon auquel il est parvenu ou de
l'emploi auquel il est nommé ... ; qu'aux
termes de l'article 34 de la loi susvisée du
11 janvier 1984 : "Le fonctionnaire en
activité a droit (...) 3° A des
congés de longue maladie d'une durée
maximale de trois ans (...). Le fonctionnaire
conserve l'intégralité de son
traitement pendant un an ; le traitement est
réduit de moitié pendant les deux
années qui suivent.
L'intéressé conserve, en outre, ses
droits à la totalité du
supplément familial de traitement et de
l'indemnité de résidence (...)
4° A un congé de longue durée
(...) de trois ans à plein traitement et de
deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire
conserve ses droits à la totalité du
supplément familial de traitement et de
l'indemnité de résidence ..." ;
qu'aux termes de l'article 37 du décret
susvisé du 14 mars 1986 : "Au traitement ou
au demi-traitement s'ajoutent les avantages
familiaux et la totalité ou la moitié
des indemnités accessoires, à
l'exclusion de celles qui sont attachées
à l'exercice des fonctions ou qui ont le
caractère de remboursement de frais." ; Considérant que le traitement visé
par les dispositions précitées est
lié à un indice propre à
chaque agent public et à un montant
régulièrement actualisé et
n'inclut aucune indemnité, qu'elle fasse ou
non l'objet d'une retenue pour pension, sauf
disposition expresse de nature législative
ou réglementaire prévoyant une telle
intégration ; qu'il s'en suit que la seule
circonstance que l'indemnité spéciale
aux personnels des services actifs de la police
soit soumise à retenue pour pension ne peut
être utilement invoquée pour soutenir
qu'elle doit être regardée comme
partie intégrante du traitement de l'agent ;
Considérant qu'aucun texte
législatif ou réglementaire n'a
prévu l'intégration de
l'indemnité spéciale aux personnels
des services actifs de la police dans la
rémunération versée aux
fonctionnaires de police placés en
congé de longue maladie ou de longue
durée ; que cette indemnité,
attachée à l'exercice des fonctions
n'est pas au nombre de celles dont le maintien est
prévu par les dispositions
précitées de l'article 34 de la loi
du 11 janvier 1984 et de l'article 37 du
décret du 14 mars 1986 ; que dans ces
conditions M. C. ne peut utilement se
prévaloir ni de circulaires
ministérielles dépourvues de
caractère réglementaire, ni invoquer
le principe d'égalité des
fonctionnaires ; Considérant qu'il résulte de ce
qui précède que M. C. n'est pas
fondé à soutenir que c'est à
tort que, par le jugement attaqué, le
tribunal administratif, a rejeté ses
demandes tendant à l'annulation de la
décision attaquée et à la
condamnation de l'État à lui verser
des indemnités de sujétions
spéciales de police pour la période
durant laquelle il était en congé
longue durée ; Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que par voie de
conséquence, les conclusions de M. C.
tendant à ce que la Cour fasse application
des articles L.911-1 et L.911-2 du code de justice
administrative ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code
de justice administrative : Considérant que les dispositions de
l'article L.761-1 du code de justice administrative
font obstacle à ce que la partie perdante
puisse obtenir, à la charge de son
adversaire, le remboursement des frais
exposés par elle et non compris dans les
dépens ; que les conclusions
présentées à ce titre par M.
C., doivent dès lors être
rejetées ; Considérant que, dans les circonstances
de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire
droit aux conclusions susmentionnées
présentées par le ministre de
l'intérieur ; D E C I D E : Article 1er : La requête de M. C. est
rejetée. Article 2 : Les conclusions du ministre de
l'intérieur tendant à la condamnation
de M. C. au paiement des frais exposés et
non compris dans les dépens sont
rejetées. Article 3 : Le présent arrêt sera
notifié à M. C. et au ministre de
l'intérieur, de la sécurité
intérieure et des libertés
locales.