POLICIERS MUNICIPAUX ?
La loi du 15 avril 199 relative aux polices municipales n'a pas mis un terme au débat entre les partisans et les adversaires de l'armement des policiers municipaux. Le législateur n'a pas clairement tranché la question, laissant cette tâche au pouvoir réglementaire, qui tarde à rendre sa copie (on attend toujours le décret armement entre autres).
Dans ce contexte, Laurent-Franck Liénard, avocat et spécialiste du droit des armes, a soutenu, début octobre, un mémoire consacré à "l'armement des policiers municipaux", dans lequel il estime nécessaire de doter les agents d'armes à feu. "La Gazette" rend compte de ce travail.
Les policiers municipaux doivent être dotés d'une arme à feu. Telle est la principale conclusion de Laurent-Franck Liénard , au terme de son mémoire de fins d'études, présenté début octobre, dans le cadre du DESS "ingénierie de la sécurité", organisé par l'Institut des hautes études de la sécurité intérieure (IHESI). Les missions de sécurité publique qui incombent aux policiers municipaux et la réalité de leur travail sur le terrain justifient qu'ils disposent aujourd'hui d'un armement suffisamment efficace pour assurer leur sécurité et celle des citoyens, estime Laurent-Franck Liénard.
"Le port d'une arme létale semble aujourd'hui être une nécessité", écrit-il, compte tenu du développement des agressions armées. Dans ce contexte, "ne donner à des policiers municipaux que des moyens intermédiaires ou des armes non létales, c'est les placer dans une situation d'infériorité manifeste", estime l'auteur.
Laurent-Franck Liénard affirme ainsi que "le seul moyen efficace de lutte contre les délinquants déterminés, armés et violents, reste l'arme à feu, car elle seule peut garantir, dans des situations extrêmes, une mise hors de combat immédiate et certaine de l'adversaire".
L'armement : un choix technique
Dans ces conditions, estime l'auteur, "mettre un homme ou une femme dans la rue avec une arme létale est avant tout une responsabilité technique avant d'être une responsabilité politique". De ce point de vue, Laurent-Franck Liénard déplore "l'ignorance technique" qui a entouré le débat législatif sur cette question. Plus encore, s'il reconnaît que les conditions de l'armement des policiers municipaux sont désormais, et pour la première fois, fixés par la loi, il rejette la "justification conjoncturelle" de l'armement, restrictive à ses yeux, posée par l'article 7 de la loi du 15 avril 1999. Au passage, l'auteur critique le pouvoir "discrétionnaire" confié par la loi au préfet qui pourra autoriser ou refuser l'armement des agents, tout en décidant, le cas échéant, de la nature de l'armement, alors que "rien ne permet de dire qu'il aura les capacités techniques suffisantes " pour le faire.
Selon lui, "d'un principe de liberté des communes , on est clairement passé à un principe général d'interdiction. au contrôle à posteriori par les préfets a été substitué un régime d'autorisation préalable. Enfin la règle (armement constant des policiers) est devenue l'exception (circonstances particulières et requête motivée)". Laurent-Franck Liénard estime enfin qu'en renvoyant à un décret les conditions matérielles de l'armement, "le Parlement confie au pouvoir réglementaire une tâche très délicate". Pour l'heure, sept mois après la promulgation de la loi, le fameux décret se fait toujours attendre.
Selon Laurent-Franck Liénard, les policiers municipaux devraient être armés d'une arme de poing, revolver ou pistolet semi-automatique, classée dans la 1ere ou 4 éme catégorie française (catégorie B dans la classification européenne fixée par la directive 91 / 477 /CE du 18 juin 1991). "Le calibre minimum de ces armes devrait être, pour les revolvers, le 38 spécial, et pour les pistolets semi-automatiques le 9 mm parabellum". Les munitions "ne doivent porter qu'un projectile destiné à ne pas traverser les corps humains (...) Tout projectile à tête blindée ou entièrement chemisé doit être proscrit". Par ailleurs, les policiers équipés de revolvers "doivent être dotés d'au moins un moyen technique de rechargement rapide de leur arme". Le port d'une arme doit, dans le même temps, s'accompagner du port d'une protection balistique (gilet pare-balle). L'auteur insiste également sur les moyens intermédiaires dont les agents doivent être munis, "qui leur permettront de graduer le degré de leur riposte en fonction de la violence de l' agresseur" : bâton de défense (matraque ou tonfa), aérosol de gaz lacrymogène, moyen d'entrave ou de rétention (menottes métalliques ou flexibles). Enfin, tout en affirmant que "les service de police municipale sont, en France, les groupements professionnels armés les plus sûrs", l'auteur insiste sur le renforcement de la formation continue des agents.
Xavier
Brivet / LA GAZETTE du 8 novembre 1999